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Macaire

 

Saint-Malo-de-Phily

 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Saint-Malo-de-Phily

 

Macaire :

«  Reine de Deauville »

Plechatel, le 25 mai 1932. (De notre envoyé Spécial Ouest-Eclair) :

UN MINOTIER DE PLÉCHATEL, PRÈS DE RENNES, EST PLACÉ SOUS MANDAT DE DEPOT : Il avait un déficit de 5 millions de francs.

 

Depuis un an, dans la minoterie, les meules ne tournent plus.

Tout près de la riante vallée où la Vilaine promène ses eaux tranquilles, entre les carrières grises de Pléchatel, le château de Plessis-Bardoult se dresse au milieu d'un superbe parc où frissonnent les sapins argentés. 300 hectares de pelouses vertes, de parterres, d'étangs monotones, où les sources chantent et de taillis sauvages inondés de soleil. Au milieu, comme un diamant dans une mer d'opales et de jade, un manoir éblouissant de lumière dont les extrémités sont rongées par le lierre et la vigne vierge.

C'est là, dans cette somptueuse demeure que logeait, il y a deux jours encore, M. Simon, le minotier dont tout le monde disait qu'il était honnête et bon.

Et voici qu'hier, le petit bourg de Pléchâtel se réveillait sous le signe du scandale. M. Simon venait d'être arrêté.

L'HISTOIRE MALHEUREUSE D'UN MEUNIER et DE SON MOULIN : Meuniers de père en fils, les Simon avaient légué à celui qui nous occupe aujourd'hui, avec leur château princier, la magnifique minoterie que baigne la Vilaine non loin de là.

Simon avait épousé une riche héritière, Mlle de Campagna, qui lui donna plusieurs enfants.

Peu compétent en matière de farines et de grains, M. Simon avait confié la direction de son usine à M. Goribon.

Ainsi, éloigné des soucis de l'existence, il coulait des jours heureux au Plessis-Bardoult, laissant en très grande partie la responsabilité de la gérance de la minoterie à son directeur en qui il avait une confiance illimitée.

La minoterie marchait à merveille, M. Simon gagnait de l'argent et se lançait dans le monde. Sa femme ne fut-elle pas «  Reine de Deauville » ?

Et voici qu'un jour, le 6 juillet dernier exactement, les fournisseurs et créanciers du riche industriel recevaient d'un homme de M, une lettre laconique, mais combien édifiante M. Simon suspendait ses paiements et demandait une liquidation judiciaire à l'amiable.

Une réunion des créanciers eut lieu dans les études de M' Perrier, avoué, et de Maître Guérin, notaire Rennes.

Des contrôleurs aux comptes furent nommés MM. Chesne: de Maure Guibert, de Bain-de-Bretagne M. Pauloin, du Mans: Laudrin, de Saint-Brieuc, et Servieux, du Préau (Eure).

Mis en faillite Il y a trois mois à peine par le tribunal de Redon, M. Simon fit appel à la Chambre correctionnelle de la Cour, mais les créanciers plaidèrent le maintien de la faillite qui fut annoncée.

Peu de temps après plusieurs plaintes, étaient déposées sur le bureau du Procureur de la République.

Lundi, M. Guyon, juge d'instruction à Redon convoquait Simon et le mettait sous mandat de dépôt en l'inculpant de banqueroute frauduleuse. Mais le minotier se refusa à toute explication et déclara qu'il ne parlerait qu'en présence de son avocat, Maître Chaplet du barreau de Rennes.

Nous avons joint, hier, l'un des créanciers :

Je connaissais Simon de longue date. C'était presque un ami. J'avais en lui une très grande confiance. C'était un homme très riche, le « Seigneur de Plessis-Bardoult ». Son frère, un ex-banquier, ne le laissait manquer de rien. Mais voilà Simon était un incapable et un faible: il fut de plus, très mal secondé. Il avait des goûts de lucre et pour satisfaire à certaines exigences, il se laissa aller à la fraude.

Simon nous a toujours payé jusqu'au 6 juillet 1931. Mais lorsque nous avons « mis le nez » dans sa comptabilité, nous nous sommes aperçus que les affaires marchaient mal depuis1927. Le minotier achetait le matin de la farine 250 fr., par exemple et la revendait l'après-midi 230 fr.; pour les grains, c'était la même chose Il achetait toujours à crédit, mais revendait de suite au comptant, ce qui lui permettait de faire rentrer un peu d'argent.

Mais tant va la cruche a l'eau. Simon fut bientôt acculé à la ruine, vous savez le reste.

Pouvez-vous nous dire à combien se monte le déficit ?

A plus de cinq millions de francs! Parmi les 40 victimes de Simon, il y en a qui ont perdu peu. D'autres beaucoup : 75 à 80.000 fr.

Quels sont, parmi les créanciers dont vous me parlez, ceux qui accusent les plus grosses pertes ? MM. Burel, minotier à Domport; Heurtebize, de La Chapelle-en-Ribouls; Lepeigneul, à Bain-de- Bretagne; Perrigault minotier à Romillé; Piquerel, boulanger à Bain; Chesnel, à Mur-de-Bretagne ; Laudrin des Moulins du Mans; Dufeu de Rouge; Guibert de Bain-de-Bretagne et tant d'autres.

N'avez-vous jamais remarque un retard quelconque dans le paiement de vos fournitures ?

« Non. Jamais. Nos factures étaient payables dans les dix jours, mais généralement Simon nous demandait dix jours de crédit supplémentaires. »

Vous expliquez-vous, malgré tout, les agissements de votre client ? En détournant légèrement la tête. Comme s'il n'était pas sûr de sa réponse, notre interlocuteur nous répondit sourdement « Non ».

M. Duclos maire de Pléchâtel,  gentleman farmer » à la carrure d'athlète, nous reçoit aimablement prés de sa basse-cour, où la volaille évolue bruyamment.

M. Simon ? nous dit-il, une vieille amitié me liait a lui. C'était un homme probe et loyal. dont personne n'avait à se plaindre. Ses fermiers l'estimaient, car Il ne se ménageait pas. Demandez à n'importe lequel des habitants de la commune et il vous dira « M. Simon était un brave homme ». Ne pouvez-vous m'en dire davantage ? Je vous ai dit que Simon était mon ami.

Nous respectons les sentiments qui retiennent le maire de Pléchâtel et nous repartons sur la route poudreuse et délicieusement ombragée, en quête de nouveaux renseignements.

A LA MINOTERIE :

A quelques mètres seulement de la voie de chemin de fer, s'élèvent les hautes bâtisses de la minoterie Simon. Une grosse cheminée en brique rouge couronne  l'ensemble.

 

Plechatel, le 25 mai 1932. (De notre envoyé Spécial Ouest-Eclair)

 

  La gare de Pléchatel

 

 

 

 

 

 

 

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